Pourquoi est-ce que Lyon a longtemps été appelé ville de la soie ?
Quelle est son origine ?
Quels textiles sont produits à partir de la soie ?
Que tu sois fondateur d'une marque, styliste, modéliste, acheteur et j'en passe, tu comprendras davantage ce que tes fournisseurs t'expliquerons.
Ça facilitera et accélérera ton choix des matières.
1. Quelle est l'origine de la soie ?
1.1. Route de la soie
3. Comment est produite la soie ?
5. Production mondiale
5.1. Principaux pays producteurs
5.2. Lyon : ville de la soie ?
10. Écologie
10.1. Hydroponie : nouveau modèle viable ?
Comme tout matériau rare et précieux, l’origine de la soie est entourée d’un voile de mystère.
Ce serait une princesse chinoise prénommée Si-Ling-Chi qui aurait découvert le fil de soie par pur hasard.
Elle sortit un fil issu d’un cocon qui était tombé dans sa tasse de thé.
Lorsqu’elle essaya de le récupérer, il se serait dévidé devant ses yeux.
Ça a été un secret jalousement gardé pendant plusieurs millénaires.
Le ver à soie fut ensuite élevé, ce qui donna lieu à la sériciculture, et ainsi, aux routes de la soie.
Ce qui est passionnant à propos de la soie, c’est sa capacité d’innovation. La recherche & développement fait tout simplement partie de son histoire.
Elle n’a pas seulement inspiré l’industrie textile, mais aussi l’aéronautique (Concorde) et l’informatique.
Si une branche de textiles connectés s’appelle Google Jacquard, ce n’est pas pour rien.
C’est un véritable hommage de la part de Google.
Tu as probablement déjà entendu ces mots : la route de la soie. C’était peut-être sur les bancs d’école ou dans une conversation.
Pour te les résumer au plus simple, c’était des routes commerciales reliant l’Asie à l’Europe.
Lorsque l’on parle de routes, elles n’étaient pas seulement de nature terrestres, mais aussi maritimes.
Les traces les plus anciennes retrouvées remonteraient à 2000 ans avant notre ère. De nombreux biens matériels et immatériels passaient par ces chemins : du savoir-faire ou encore des marchandises.
Mais si on l’a appelée de cette manière, c’est parce que la marchandise la plus chère passant par ces chemins, c’était bel et bien la soie textile.
C’est la fibre naturelle la plus longue, elle a un aspect naturellement mat, crème ou jaune.
Mais aussi la plus fine, ce qui implique qu’elle est aussi la plus solide et résistante.
Alpaga : 20/50 cm
Lama : 8/25 cm
Cachemire : 3,5/5 cm
Soie (Bombyx Mori) : 500/1500 m
Le diamètre de la fibre est de 9 à 12 micromètres.
Un cheveu a un diamètre de 75 micromètres à titre de comparaison.
Sa ténacité est de l’ordre de 0,3 à 0,5 newton textile. (N/tex). Celle de la fibre de laine est inférieure à 0,3 N/tex.
Une matière synthétique réputée pour sa résistance est équivalente à 0,5 N/tex (Polyamide 66).
En moyenne, un papillon bombyx mori est en mesure de pondre 300 à 500 œufs. C’est aux alentours du printemps qu’ils éclosent.
32 jours. C’est le temps nécessaire à la chenille pour avoir la taille nécessaire avant de se nourrir des feuilles du mûrier.
C’est à partir de la lèvre inférieure des chenilles que le filament sort. Mais c’est seulement à la suite des 4 mues qu’elle est capable de créer la matière recherchée.
C’est à partir de ce moment qu’elle commence à filer.
Ce filament est à la base sa bave qui se solidifie au contact de l’air. La construction de son cocon dure en moyenne entre 2 à 4 jours.
La transformation de chenille à papillon dure une vingtaine de jours. Mais c’est peu avant ce moment que les cocons sont traités pour éliminer la chenille avant qu’elle casse son cocon.
Une fois que toutes les étapes précédentes ont été effectuées, il faut traiter la fibre. Cinq étapes sont nécessaires pour la rendre utilisable.
Comme mentionné un peu plus haut, la métamorphose du papillon est arrêtée en l’éliminant, différents moyens étant possibles.
Ensuite, les cocons sont triés en fonction du grade de qualité, la taille et ceux qui sont percés.
Dans le but d’éliminer les déchets, les cocons sont trempés dans de l’eau chaude.
Lors de la phase de dévidage, plusieurs cocons issus du tri sont sélectionnés puis les fils s’assemblent simplement à l’aide de la séricine (grès), c’est une colle naturelle qui enveloppe le fil. C’est ce qui donne un fil de soie grège.
Concernant la dernière étape de décreusage, elle consiste à éliminer la séricine dans un bain chaud pour rendre la soie brillante.
Par contre, cette étape peut lui retirer jusqu’à ⅓ de son poids et de son volume. C’est pour cette raison que certains fabricants ont mis au point des traitements pour alourdir le fil et ne pas perdre la main si précieuse pour de nombreux experts textiles, comme toi.
Selon l’INSERCO (International Sericultural Commission), le marché de la soie sur l’industrie textile représente seulement 0,2%.
En regardant le graphique de production globale de la soie grège, tu peux te rendre compte que la production a augmenté de 432,76% entre 1961 et 2019.
Même si sa croissance est très dépendante des leaders mondiaux : la Chine et l’Inde.
En seulement deux décennies (2000-2019), la croissance a été de 73,33%. Si elle a eu un petit accident entre 1995 et 1997, à hauteur de -33,27%, c’est parce que la Chine dans le but d’une politique commerciale a tenté de faire augmenter les prix.
Pour creuser plus en profondeur le graphique de production mondiale, je te propose de comparer les productions de cocons et de soie grège.
Durant la période de 1961 à 2019, la production de cocons est passée de 212.801 à 660.944 tonnes, soit une progression de 210,59%.
À titre de comparaison, sur la même période, celle de soie grège est passée de 32.503 à 173.162 tonnes soit une croissance de 432,76%.
Maintenant, si l’on compare ces deux produits, la différence est de 320,11% en moyenne, pour la simple raison qu’il faut une multitude de cocons pour produire cette fibre textile d’origine animale.
De nombreux spécialistes estiment que la production ne cessera de croître de manière exponentielle à l’aide des découvertes récentes permettant d’optimiser le rendement de ces cocons.
Selon un rapport de la FAO (Organisation des Nations Unies de l’Agriculture et de l’Alimentation) concernant la production mondiale de soie grège (moyenne sur la période 1961-2019), les plus gros producteurs mondiaux sont les suivants :
Même si les Chinois restent les premiers producteurs mondiaux, il faut savoir que la soie de très haute qualité est majoritairement produite au Brésil.
C’est grâce à sa communauté japonaise. C’est la deuxième communauté la plus importante hors du Japon.
Ce succès est faisable grâce à la météo idéale du Paraná et de São Paulo permettant de cultiver les mûriers dans les meilleures conditions, nourriture essentielle des larves.
D’après un rapport réalisé par l’Université de Cambridge, une grande partie de la soie sourcée par Hermès provient du Brésil.
L’Inde est le seul pays au monde à être capable de produire les principales variétés de soie, à savoir :
Nous devons notre culture confidentielle à Charles VIII qui a encouragé de nombreuses villes se situant en Auvergne-Rhône-Alpes, région actuelle.
Les Cévennes ont été utilisées pour cultiver le mûrier, élément indispensable à la culture de la soie.
De 1760 à 1780, la production de cocons de soie rencontre un véritable essor jusqu’à atteindre environ 7000 T/an.
C’est en 1853 que la sériciculture française atteint son apogée en produisant 26.000 T.
En 1849, les sériciculteurs rencontrent une vague de maladies touchant les vers à soie.
C’est en important des graines depuis l’Espagne et l’Italie que la production a pu être sauvée.
1855 : l’Italie est également touchée par ces maladies, l’importation a amplifié le problème.
La quantité s’éleva à 7500 T seulement en 1856.
De nombreux cocons sont alors expédiés en France par la Chine, le Japon et la Géorgie, mais le transport et le stockage n’étant pas optimaux, le problème n’a toujours pas été résolu.
Ensuite, la production française de soie baissera année après année à la suite d’une concurrence très importante, de nouvelles sources de revenus plus intéressantes sans oublier l’apparition des fibres synthétiques.
Aujourd’hui, la demande de soie reste très restreinte contrairement à celle des matières synthétiques pour ne citer qu’elles.
C’est pourquoi la région lyonnaise a dû s’organiser autour de nouvelles possibilités et est devenue la première région textile française.
La Commission Internationale de Sériciculture (INSERCO) siège dorénavant en Inde, avant d’être restée de nombreuses années à Lyon.
C’est une matière qui a tendance à retenir l’humidité de l’air, par absorption ou par adsorption.
Elle peut absorber jusqu’à 30% de son poids en eau sans le ressentir portée. Semblable à la laine.
Une forte résistance thermique impliquant une thermorégulation de la température corporelle, été comme hiver. Sa brillance est due aux sécrétions nécessaires à sa fabrication.
Sans oublier sa pertinence des couleurs.
Disséquée, étudiée, copiée, mais jamais égalée, c’est le Graal des fibres textiles
Jacques Poulenard – Expert Qualité – Intersoie
Cette fibre d’origine animale propose différents avantages comme une résilience élevée ou encore des propriétés de thermorégulation.
Chaque variété propose des avantages et des inconvénients différents, chacune est destinée à un aspect et une utilisation différente.
Le principal inconvénient de la soie, c’est son prix. La qualité n’a pas de prix.
L’entretien est aussi plus complexe que des produits issus de l’habillement à base de fibres de coton ou de lin.
Pour aller plus loin dans l’entretien, la froissabilité, le mélange de matière, la tenue des couleurs face à la lumière sur une longue période d’exposition ou encore la transpiration peuvent être de réels ennemis pour le consommateur.
Enfin, comme toute fibre textile d’origine animale, il existe un problème d’éthique concernant les cultures non encadrées.
Quelle que soit la raison pour laquelle tu souhaites éviter d’utiliser la soie, que ce soit des raisons financières, éthiques, esthétiques ou convictions personnelles, il existe des alternatives à la soie.
La première alternative qui me vient à l’esprit c’est la “soie artificielle”, plus communément appelée viscose. C’est la raison pour laquelle elle a été créée.
Même si elle propose une solution tout à fait viable, des questions ont été soulevées concernant les problématiques écologiques liées à sa production.
Comme toute fibre textile d’origine naturelle, il existe deux possibilités : la culture conventionnelle et biologique.
Dans le cadre d’une culture conventionnelle, de nombreux produits chimiques sont utilisés, même si leur impact environnemental est d’après de nombreuses études moins important que la culture du coton conventionnel.
Si des engrais à base de fumier sont utilisés, l’eutrophisation est une réelle possibilité catastrophique.
Lorsque l’on parle du phénomène d’eutrophisation, ça signifie qu’un excès de substances nutritives est conduit dans un milieu aquatique (eaux souterraines) dans ce cas particulier.
Ce qui implique une prolifération d’algues nuisibles, des bactéries qui ont pour but de les décomposer, consomment une quantité d’oxygène importante.
D’autres bactéries se développent en rejetant des matières toxiques : ce qui crée des zones mortes.
Une zone morte, c’est une zone déficitaire en oxygène (milieu aquatique), beaucoup de poissons et crustacés privés d’oxygène s'éteignent. En se décomposant, le phénomène est accentué.
Le second problème soulevé, c’est la consommation de ressources, on estime qu’un mûrier peut accueillir jusqu’à 100 vers à soie.
Pour fabriquer 1 seul mètre de soie textile, 3.000 vers à soie sont nécessaires en moyenne, soit 30 mûriers. Tout en sachant que la majorité des variétés de mûriers perdent leurs feuilles annuellement et ne proposent qu’une seule production par an.
Sans compter toutes les étapes de la chaîne de valeur nécessitant de l’énergie, l’étape la plus consommatrice, c’est lors de la cuisson des cocons.
La majorité des textiles nécessitent un nettoyage à sec, ce qui implique des solvants.
Lorsque la soie n’est pas traitée, elle est biodégradable, mais certains fabricants ajoutent des produits chimiques dans un but esthétique ou de simplification de production, ce qui peut enlever cette propriété biodégradable.
Il existe le choix de la soie organique qui utilise un processus similaire au chemin conventionnel, à la différence qu’aucun pesticide et insecticide n’a été utilisé dans le but d’accélérer le processus.
Les vers à soie bénéficient également d'une alimentation variée, chaque aliment étant biologique. Des économies en eau sont aussi réalisées.
La soie de la paix ou “peace silk” est issue de papillons qui ne sont pas éliminés pendant leur métamorphose.
Une fois sortis de leur cocon, ils sont laissés en “liberté”. Ça donne envie, non ?
Sauf que le problème, c’est qu’après des siècles d’élevage, il a tout simplement perdu sa capacité de voler, de voir, toutes ses caractéristiques qui font de lui un papillon.
Le professeur Dickson D. Despommier, microbiologiste américain a proposé dans les années 2000 une solution pour limiter l’impact environnemental.
L’idée est de verticaliser les unités de production agricoles dans des immeubles.
Les mûriers ne pousseraient plus dans la terre, mais hors-sol, en contrôlant l’apport de nutriments.
En utilisant le principe d’hydroponie, la consommation d’eau est diminuée puisqu’elle est traitée pour être réutilisée.
L’avantage de ce type de culture, c’est le contrôle d’humidité ou encore de température dans ces unités de production. Elle n’est donc plus tributaire de la météo.
En utilisant ces conditions, les feuilles de mûriers pourraient être produites en continu, ce qui n’est pas possible aujourd’hui en effectuant des roulements.
Même si l’initiative est séduisante, il reste à déterminer l’impact de la création de ces unités par rapport à l'impact actuel.
C’est un système qui intéresse de plus en plus, mais de nombreuses problématiques technologiques n’ont pas encore été résolues.
Pour vérifier l’authenticité d’une fibre textile de soie et ne pas la confondre avec du polyester, il suffit de la brûler. Aussi simple que ça.
Si ça s'enflamme rapidement avec une odeur de plastique, c’est du polyester.
En revanche, si l’odeur t’évoque le cheveu brûlé et la combustion crée une cendre fine, c’est de la soie.
Pour conclure, ce textile est un véritable miracle de la nature. Mais comme tout miracle, des limites sont nécessaires.
Elle propose des avantages très intéressants autant pour l’esthétique du produit que pour le confort du consommateur.
Longtemps considérée comme une étoffe de luxe et encore pour de nombreux siècles, sa réputation est légitime.
Même si la soie artificielle a été créée pour la remplacer, elle n’arrive pas à la cheville de cette fibre d’origine animale. La seule raison pour laquelle la viscose a été autant utilisée et produite, c’était pour les enjeux financiers qu’elle résolvait.
Si tu souhaites utiliser la soie textile dans tes collections, je te conseille de te pencher activement sur ton sourcing. Sur la culture organique plus particulièrement pour des raisons de confort et d’esthétique, libre à toi d’y ajouter des convictions personnelles.
Un petit plus pour la soie brésilienne dont la réputation n’est plus à faire, même si la production à l’échelle mondiale est infime.
Maintenant, tu connaîtras l’histoire de la soie, ses avantages et ses inconvénients !
J’espère que cet article te sera utile, n’hésite pas à laisser un commentaire ou à t’abonner pour être informé de nos prochains articles !